Écoresponsabilité, éthique et marques de sport
Pouvez-vous me citer au moins 8 grandes marques de vêtements de sport ? Trop facile ! Mais combien sont éthiques et/ou écoresponsables ? Bizarrement, il est plus difficile de répondre à cette question…
Peut-on dire que Nike est une marque éthique alors qu’elle fait partie de la liste des marques exploitants des ouïghours ? Qu’en est-il d’Adidas ? Puma ?
Où sont fabriqués leurs produits ? Dans quelles conditions ? Tant de questions sans réponses, ces marques sont clairement loin d’être transparentes. Heureusement, certaines marques sont là pour offrir une solution et une alternative aux marques dites “traditionnelles”.
Les marques de sport, un monde tout en opacité
Je mets souvent en avant Zara, H&M, Primark, Bershka… Pour parler de fast fashion. Mais qu’en est-il des marques de sport ? Est-ce que l’on peut parler de fast fashion ?
Adidas, Nike, Puma, Decathlon, Le Coq Sportif, Under Armour… Vous connaissez ces marques.
Les maîtres-mots de leurs campagnes de communication sont souvent : performance, praticité, résistance, style, dépassement de soi… Ces beaux messages nous donnent envie d’acheter pour faire partie d’un ensemble, profiter du rayonnement de la marque, elles nous inspirent confiance. Mais est-ce que leurs campagnes de communication vont au-delà des paroles ? Est-ce qu’elles arrivent à dépasser leurs propres limites d’un modèle basé sur la surconsommation ? Arrivent-elles à répondre aux enjeux écologiques et sociaux ?
Je pourrai analyser toutes les marques de sport, mais ce serait beaucoup trop long pour un article de blog. Nike et Adidas sont les meilleures références dans le domaine pour répondre à mes questions, comme ce sont des marques internationales et connues de tous. J’ai analysé certains de leurs produits, mais aussi leur page web sur le thème “développement durable”.
Nike est le premier équipementier de football au monde, la marque a connu bon nombre de controverses : travail des enfants en 1997, mouvements sociaux au Viêt Nam en 2008 en raison des salaires trop bas (62$/mois), Paradise Papers en 2017, lobbying et la découverte de l’exploitation de Ouïghours en 2020.
D’un point de vue durabilité, on apprend que Nike a un programme “Move to Zero” peut lire sur leur page dédiée au développement durable :
Déjà, si nous pouvons noter que l’utilisation répétée de la majuscule est agressive, on constate que le fond est du vent, plus de vent et je m’envole. Objectif zéro quoi ? “Notre choix est de prospérer”, et c’est apparemment l’unique réel objectif. Quand je lis la suite de la page, j’ai vraiment l’impression qu’il ne se passe rien, et que l’on nous sert du flan :
“LES VÊTEMENTS PORTANT LA MENTION « MATIÈRES DURABLES » SONT FABRIQUÉS AVEC AU MOINS 55 % DE MATIÈRES RECYCLÉES ET LES CHAUSSURES PORTANT CETTE MÊME MENTION SONT FABRIQUÉES AVEC AU MOINS 20 % DE LEUR POIDS EN MATIÈRES RECYCLÉES.”
Génial, mais encore ? Plus de détails sur les matières ? Des labels ?
Le clou du spectacle : “Ce logo représente un pas de plus dans notre démarche Move to Zero”, super un logo qui veut tout et rien dire.
En regardant les produits ce n’est pas mieux, les vêtements en matière durable ne sont plus disponibles pour certains. Et quand, miracle je trouve la page avec les produits en “matières durables”, c’est encore très flou, aucun détail précis, c’est assez approximatif, aucun label, rien. Je ne parle même pas des autres produits, nous avons un mélange de matières qui empêche le recyclage de celles-ci.
Aucune traçabilité sur la production et la fabrication.
Bref, Nike = greenwashing & opacity.
Adidas est un peu plus “sage”, d’un point de vue controverses, si on oublie, les affaires avec le Crédit Lyonnais et Bernard Tapie dans les années 90-2000, des traces d’éthoxylates de nonylphénol (un perturbateur hormonal) dans leurs vêtements et les cours d’eau chinois où sont fabriqués les vêtements, en 2011. Et enfin, un soupçon de greenwashing pointé par Challenge’s.
Tout comme Nike, je me suis rendue sur le site d’Adidas pour voir ce qui est dit.
En lisant ça, je suis heureuse de lire “transparence totale sur le cycle de vie complet du produit”, mais qu’est-ce que ça veut dire ? Pouvez-vous nous en dire plus ? Où peut-on retrouver cette transparence du cycle de vie du produit ?
Par contre, il n’y a rien sur la sobriété et la réduction de la production, qui est l’élément central de la slow fashion, car en général, nous surproduisons.
Pourquoi pas, la paire de running à 3 kg de CO2, mais que représentent en kg de CO2 les autres paires ? Si vous vendez 10.000 paires, vous voilà avec 30 tonnes de CO2 émises.
Et quand je clique sur “savoir plus”, je tombe sur cette fameuse basket à 3 kg de CO2, mais franchement, il n’y a aucune info sur les matières, la traçabilité… RIEN. Notons, quand même “conçue en partie à base de matières recyclées”, voili, voilou. Et même en allant voir les autres produits, il n’y a aucune précision sur ce que sont réellement les matériaux recyclés.
Pour conclure, le monde du sport a évolué avec son temps, ses enjeux sociaux et économiques, mais aujourd’hui nous sommes face à une problématique, qui a besoin plus que des mots et du marketing. Malheureusement, ces deux marques ne paraissent pas à la hauteur de ce que la planète et l’humanité ont besoin.
Au contraire, on nous offre une “transparence” bien opaque, une “durabilité” sans écoresponsabilité réelle. Leur argument sera peut-être “le temps d’adaptation, car le changement c’est long”, et pourtant, la crise du covid a prouvé une chose : on sait s’adapter très rapidement quand c’est nécessaire : citoyens, entreprises et gouvernements, et il est nécessaire aujourd’hui de s’adapter, le dérèglement climatique est une urgence absolue, et il est de notre devoir en tant qu’humain de traiter convenablement, cette planète et tous les être vivants.
La transparence dans le sport, ça existe vraiment ?
Personnellement, je suis très souvent déçue du décalage entre les discours des marques, et leurs réels engagements. On est souvent face à du greenwashing, viendra un jour où le socialwashing sera “tendance”. Qu’est-ce que j’entends par socialwashing ? Le fait de mettre les conditions de travail et les salaires, des couturiers et de toute la chaîne textile, au centre des préoccupations d’une marque, dans le langage communicationnel, mais sans réel changement dans la vraie vie.
Heureusement, il existe de plus en plus d’alternatives écoresponsables et éthiques dans les marques de sport, comme : Circle, Hopaal, The Running Republic… C’est pour la marque Spiridon que j’ai eu un réel coup de cœur, c’est elle que je vais présenter aujourd’hui.
Spiridon a vu le jour en avril 1972, c’était au départ, une revue internationale de course à pied. La volonté de Spiridon, à l’époque, était d’inclure TOUTE PERSONNE qui avait envie de courir, les jeunes, les moins jeunes, et surtout, les femmes, qui n’avaient pas le droit de courir plus de 800m en compétition, “trop difficile pour elles”, disaient-ils à cette époque. [ frisson d’effroi ]
Spiridon soutiendra et aidera à organiser les premières courses libres hors stade, et invitera Kathrine Switzer, première femme à avoir couru le marathon de Boston, à participer clandestinement à la course Morat-Fribourg.
En 1980, en France, les femmes sont enfin autorisées à courir des courses de plus de 5000m. [ Alléluia mes sœurs et mes frères ]
En parallèle de ses revues, Spiridon propose une gamme de vêtements de sport. Toutefois, les activités de Spiridon s’arrêtent en 1989.
Aujourd’hui, Spiridon refait surface, c’est en 2020 que la marque fait son retour avec une gamme de vêtements. Les valeurs de Spiridon restent les mêmes, donner la possibilité à TOUTES LES PERSONNES qui le souhaitent de courir, tout intégrant les enjeux environnementaux et sociaux de notre époque.
En me rendant sur l’eshop de cette marque de sport écoresponsable et éthique, je ne suis pas déçue. ENFIN DE LA TRANSPARENCE, toute la chaîne de fabrication est détaillée. On propose une collection plus petite en nombre de produits et en quantité, mais avec une qualité bien meilleure.
Pour chaque produit, on a la composition des matières, leur provenance, le lieu de fabrication et de conception. Les matières sont écoresponsables (des matières recyclées, respectueuses de l’environnement et durables), la fabrication plus locale (France, Portugal et Italie) pour réduire l’impact des transports, mais aussi garantir de meilleures conditions de travail.
Ce que je leur souhaite ? Comme à toutes les marques éthique et écoresponsable, de grignoter un peu de ce marché surdominant. Enfin, nous avons des marques et des entreprises, que la planète et les humains méritent.
Évoluez, prospérez, en garantissant de meilleurs salaires, une fabrication plus équitable et qui préserve la planète. J’ai hâte de voir leurs prochaines créations, un maxi bob, une veste étanche… Ou que sais-je.
Il y a un monde entre les marques de la première partie, et la démonstration de bon sens que nous font ces marques dans la deuxième partie. Elles travaillent dans le respect de notre environnement et de ses semblables, est-ce trop demander que ces engagements deviennent la norme ? L’inverse me paraît désormais surréaliste et inenvisageable pour le futur.
Rendez-vous sur mon annuaire des marques écoresponsables et éthiques, pour découvrir toutes les alternatives à la fast fashion.
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