Pourquoi les marques de mode éthique sont en difficulté actuellement ?
Plus le temps passe, et plus l’actualité paraît difficile, après le Covid, la guerre en Ukraine, quant au dérèglement climatique, son ombre plane depuis un moment, et on commence (déjà) à ressentir ses effets. Nous vivons sur la même planète, pourtant, le monde paraît très individualiste souvent, et déconnecté des uns des autres. La mode éthique et écoresponsable n’est pas épargnée par les crises en cours, elle semble même plus sensible et fragilisée par ce qui se passe, mais pourquoi ?
Cet article ne se base que sur mon interprétation, et mon analyse de ce qu’il se passe actuellement. Vous êtes libres de compléter et d’apporter votre point de vue en commentaire. 😉
Des crises internationales depuis plus de 2 ans
Pour commencer, je ne vais rien vous apprendre, la crise du COVID a laissé un peu de répit à la planète, mais a raréfié certaines matières.
S’en est suivi la guerre en Ukraine, avec la Russie, et là, ce sont d’autres matières premières qui se sont raréfiées. Même si parfois, on a l’impression que ses crises servent à gonfler les prix pour certains.
Sans oublier la crise climatique qui se ressent avec des sécheresses, des inondations… Notre modèle économique ne semble pas stable et préparé à ce genre d’événements, au contraire, ils prouvent que les prix peuvent flamber, à tout moment.
La conséquence directe : tous les prix augmentent et nous vivons une inflation internationale, de la culture de la matière, comme le coton, à la fabrication du vêtement. SYMPA !
Comme tout augmente, et surtout les prix de l’énergie, c’est toute la chaîne de production qui est impactée.
Problème pour la mode éthique ? Les marges et les quantités de fabrication.
Les marges et les quantités de fabrication
Le but de la mode éthique et écoresponsable est de proposer des vêtements de qualité, avec une fabrication respectueuse de la planète et de l’humain. Ce qui implique un coût de production plus élevé, en raison des salaires plus justes, une fabrication plus qualitative, des matières plus nobles et biologiques…
Ce produit a donc un coût plus élevé. Ce qui est compliqué à faire comprendre aux consommateurs habitués à la fast fashion, s’il n’y a pas de campagne de marketing invasive pour sous-entendre que le produit est “luxueux”, qu’il va apporter gloire et plaisir infini.
La mode éthique est un monde plus sobre dans son marketing, moins agressif. Donc certaines personnes ne vont pas trouver de valeur ajoutée pour acheter plus cher le “même” vêtement qu’en Fast Fashion.
Donc, les marques de mode éthique, pour rester à un prix abordable, font peu de marge.
Exemple : une marque éthique produit un vêtement, le coût de fabrication est à 30€, (hors transports, un peu de marketing et de communication, les autres frais, et la marge pour le développement), la marque va revendre son produit 2 à 3 fois son coût de fabrication, pour intégrer ce qui n’est pas compris, c’est-à-dire entre 60€ et 90€.
Cette marge, en réalité, est “ridicule” quand on connaît les marges de la fast fashion. Même exemple, un vêtement de fast fashion coûte 30€ à la fin de la chaîne de fabrication, il sera revendu 7 à 10 fois le prix, c’est-à-dire 210€ à 300€. On est d’accord que mon exemple reflète plus une marque type : Sandro, Maje, The Kooples… Mais que ce soit H&M, Bershka, Primark, Promod, Zara, Shein, le modèle est le même, mais le coût de fabrication est beaucoup plus bas.
Mais cette marge qui était autrefois à peu près suffisante, pour les marques de mode éthique, ne l’est plus aujourd’hui en raison de l’inflation globale.
Ensuite, vous ajoutez à ça la concurrence avec d’autres marques plus “imposantes”, au niveau de la fabrication. Suite au Covid, plusieurs marques ont rapatrié leur production en Europe, et principalement au Portugal. Donc quand Sézane, Jonak, Minelli arrive avec des quantités astronomiques, en comparaison avec des marques plus sobres, malheureusement les fabricants font vite un choix… Ainsi, la mode éthique a des difficultés à fabriquer ses vêtements et chaussures.
Les habitudes de consommation
Dernière conséquence liée au consommateur : la diminution de la capacité de consommation suite à l’inflation, ou la préférence du pas cher pour maintenir sa consommation.
“Béh ouais, mais c’est trop cher la mode éthique, moi j’ai pas les moyens.”
Retournons la question : est-ce qu’un caissier est trop payé ? Est-ce qu’un médecin est trop payé ? Est-ce qu’un garagiste est trop payé ? Est-ce qu’un cadre est trop payé ?
Donc une couturière ou un couturier doit être payé de manière juste.
Certes, notre pays vit un moment d’inflation, il ne faut surtout pas l’ignorer et c’est plus difficile pour tout le monde, la consommation a quand même tendance à diminuer, surtout pour le secteur textile.
Les gens se tournent aussi vers la seconde main, une bonne chose pour la planète, mais pas pour les marques qui proposent des alternatives aux marques dominantes.
Aujourd’hui, nous payons le fruit d’un modèle économique basé sur la surconsommation. N’oublions pas que le domaine du textile est l’un des rares, voir le seul, à avoir vu baisser ses prix ces 20 dernières années.
Pourquoi ?
Petit rappel historique, la France était autrefois une terre textile, presque tout a été exporté en Asie, pourquoi (encore) ?
Non pas pour être sympa et offrir un travail bien payé aux couturières asiatiques, sinon c’est trop facile, mais pour augmenter les profits des marques et des personnes qui les possèdent. La réduction du prix initial, va permettre au consommateur d’acheter d’autres vêtements, de consommer plus et donc d’augmenter les bénéfices des marques.
Alors pourquoi le Made in France ou Europe paraît plus cher ?
Parce que la législation n’est pas la même, il existe un code du travail avec un salaire minimum, des cotisations sociales… Donc les salaires et le coût de la main d’œuvre sont plus élevés.
Un vêtement pas cher est un vêtement dont la production est payée par quelqu’un (un salaire qui n’est pas au niveau du salaire vital), ou quelque chose (pollution de la planète).
Donc les personnes habituées à acheter un vêtement à 20, 30, 40 ou 50€ dans un magasin traditionnel, n’auront du mal à changer leur consommation, surtout en période d’inflation, si elles ne se sentent pas concernées par le dérèglement climatique et les inégalités.
Et les personnes qui peuvent ou veulent consommer mieux feront attention, car elles aussi sont concernées par l’augmentation générale des prix.
EN GROS C’EST COMPLIQUÉ.
Garder espoirs
Nous vivons une période compliquée, nous sommes tiraillés entre changements profonds pour préserver la planète et répartir de façon plus juste les richesses, et confrontés à la réalité d’un modèle capitaliste bancal, où l’inflation diminue le pouvoir d’achat.
Cette diminution du pouvoir d’achat n’est pas bénéfique, car elle continue toujours à pousser à consommer.
Je sais ce que c’est d’avoir un tout petit budget consommation. C’est frustrant, mais si tu as déjà la volonté de changer, alors tu trouveras des solutions plus écolo et éthique.
On doit garder espoir, les choses changent, les mentalités aussi, il y a des personnes bienveillantes, qui essayent et proposent des alternatives. Dès que l’on peut, mettons en avant une marque de mode éthique et écoresponsable.
Bref, continuons à y croire et à rêver, on en a besoin.
*
*
Marion
Laisser un commentaire